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Le régime social des indépendants progressivement adossé au régime général - source EFL 26/12/2017
Loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 art. 15
A l’issue d’une période transitoire de 2 ans débutant le 1er janvier 2018, les travailleurs indépendants relèveront du régime général pour leurs assurances maladie-maternité, vieillesse de base - sauf les professionnels libéraux- et pour le recouvrement de leurs cotisations.
L’article 15 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 égrène sur près de 40 pages les mesures nécessaires au transfert des missions du régime social des indépendants (RSI) aux caisses du régime général et à un nouvel organisme dédié à la protection sociale des non-salariés, dénommé Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI).
Cette réforme d'ampleur sera lancée dès le 1er janvier 2018 et devra s’achever, à l’issue d’une période transitoire de 2 ans, au 31 décembre 2019, date à laquelle les caisses du RSI seront dissoutes.
Deuxième régime français de sécurité sociale, le RSI gère l’assurance maladie-maternité de tous les travailleurs indépendants ainsi que les assurances vieillesse de base, retraite complémentaire et invalidité-décès des artisans, commerçants et industriels. Il est responsable avec les organismes du réseau Urssaf du recouvrement des cotisations afférentes à ces assurances.
L'article 15 de la loi modifie le champ d'application du régime général de sécurité sociale afin d'inclure dans son périmètre l’assurance maladie-maternité dont bénéficie l’ensemble des travailleurs indépendants ainsi que le régime d’assurance vieillesse de base dont relèvent les indépendants, à l’exception des professionnels libéraux (CSS art. L 200-1 modifié).
L’affiliation des travailleurs indépendants au régime général pour les branches ci-dessus mentionnées sera obligatoire (CSS art. L 200-1 modifié).
Les développements ci-dessous exposent les principales mesures de la réforme ainsi que les dispositions transitoires les accompagnant.
Le RSI a mis en ligne sur son site internet une page d’information sur la réforme qui devrait être actualisée pendant toute sa mise en œuvre (www.rsi.fr).
Maladie-maternité
Les prestations maladie maternité seront servies par les caisses primaires
Le versement des prestations maladie-maternité des travailleurs indépendants ainsi que leur protection universelle maladie (Puma) seront confiées aux caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) d’ici le 1erjanvier 2020 pour l’ensemble des travailleurs indépendants (CSS art. L 211-1 modifié).
L'article 15 de la loi supprime la possibilité de déléguer à des mutuelles et sociétés d’assurance le service des prestations d’assurance maladie-maternité des travailleurs indépendants (CSS art. L 160-17 modifié et L 611-20 abrogé).
L'assurance maladie-maternité des travailleurs indépendants est, en principe, gérée par les caisses de base du RSI sous le contrôle de la Caisse nationale du RSI. Toutefois, celle-ci a conclu, sur le fondement de l'article L 611-20 du CSS, des conventions avec des mutuelles et sociétés d'assurance visant à leur déléguer le versement des prestations en espèces maladie-maternité.
Cette mesure est assortie de dispositions transitoires maintenant en 2018 et en 2019 le service des prestations maladie-maternité par les organismes conventionnés, sauf pour les prestations des nouveaux affiliés à partir du 1er janvier 2019. Celles-ci seront versées par les CPAM.
Les indemnités journalières des indépendants hors professionnels libéraux sont pérennisées
Les indemnités journalières dont bénéficient les artisans, commerçants et industriels à titre de prestations supplémentaires deviennent des prestations de droit commun, pour les travailleurs indépendants hors professionnels libéraux, versées aux mêmes conditions que celles prévues par les salariés sous réserve d’adaptation par décret (CSS art. L 622-1 nouveau).
Dans le cadre de l’assurance maladie gérée par le RSI, les travailleurs indépendants bénéficient de la prise en charge de leurs frais de santé dans les mêmes conditions et aux mêmes taux de remboursement que les salariés du régime général. Les artisans, commerçants et industriels peuvent, en outre, percevoir des indemnités journalières versées sur le fondement de l’article L 613-20 du CSS qui autorise, sous conditions, la mise en place de prestations supplémentaires par décret après avis de la Caisse nationale du RSI.
L’article 15 de la loi maintient la possibilité d’instituer des prestations supplémentaires par décret pour l’ensemble des travailleurs indépendants.
Peuvent être mises en place (CSS, art. L 622-2 nouveau) :
des indemnités journalières maladie pour les professionnels libéraux ;
pour les indépendants non professionnels libéraux, des indemnités journalières en cas d’accident du travail ou de maladies professionnelle.
Une cotisation de base pour les professionnels libéraux distincte de celle des autres indépendants
La loi réécrit les dispositions légales relatives au financement des prestations maladie-maternité des travailleurs indépendants. Celles-ci prévoient dorénavant deux cotisations de base : une pour professionnels libéraux et une pour les autres travailleurs indépendants, seule cette dernière couvrant le financement d’indemnités journalières maladie. Les taux de ces deux cotisations seront fixés par décret (CSS art. L 621-1 et L 621-2 nouveaux).
Cette réécriture résulte de l’intégration de la cotisation supplémentaire indemnités journalières des artisans, commerçants et industriels dans leurs cotisations de base, ces indemnités devenant des prestations de base (voir ci-dessus).
Assurance vieillesse et invalidité-décès
L’assurance vieillesse de base transférée du RSI au régime général
Le régime vieillesse de base des travailleurs indépendants hors professionnels libéraux, actuellement géré par le RSI, sera confié au régime général (CSS art. L 222-1 et L 634-2 modifiés). Leur régime complémentaire de retraite et d'invalidité-décès ne serait, en revanche, pas intégré au régime général (voir ci-dessous).
Les caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) assureront la liquidation et le service des pensions de retraite de base des travailleurs indépendants hors avocats et professionnels libéraux.
Seuls certains professionnels libéraux continueront de relever de la Cnav-PL et de la Cipav
L’article 50 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 a programmé le transfert des professions libérales non réglementées de la Cipav vers le régime d’assurance vieillesse du RSI.
Dans la mesure où le régime vieillesse de base des travailleurs indépendants, actuellement géré par le RSI, va être confié au régime général, l’article15 de la loi prévoit le transfert de certains professionnels libéraux vers le régime général d’assurance vieillesse ainsi que vers les régimes de retraite complémentaire et d’invalidité-décès des travailleurs indépendants.
A cette fin, il restreint la liste des personnes affiliées aux régimes d’assurance vieillesse et invalidité-décès des professions libérales en la limitant à certaines professions. Resteront ainsi seules affiliées à ces régimes les personnes exerçant l’une des professions suivantes :
médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme, pharmacien, auxiliaire médical, psychothérapeute, psychologue, ergothérapeute, ostéopathe, chiropracteur, diététicien ;
notaire, huissier de justice, personne ayant la qualité de commissaire-priseur judiciaire habilité à diriger les ventes dans les conditions prévues à l'article L 321-4 du Code de commerce, syndic ou administrateur et liquidateur judiciaire, agréé, greffier, expert devant les tribunaux, expert automobile, personne bénéficiaire de l'agrément prévu par l'article L 472-1 du CASF (personnes physiques mandataires judiciaires à la protection des majeurs), courtier en valeurs, arbitre devant le tribunal de commerce, expert-comptable, agent général d’assurances ;
architecte, architecte d’intérieur, économiste de la construction, géomètre, ingénieur-conseil, maître d’œuvre ;
artiste non mentionné à l’article L 382-1 du CSS, guide conférencier ;
vétérinaire ;
moniteur de ski titulaire d’un brevet d’Etat ou d’une autorisation d’exercer mettant en œuvre son activité dans le cadre d’une association ou d’un syndicat professionnel, quel que soit le public auquel il s’adresse ; - guide de haute montagne ;
accompagnateur de moyenne montagne.
Cette mesure s’appliquera aux travailleurs indépendants créant leur activité à compter du 1er janvier 2018 pour les micro-entrepreneurs et à compter du 1er janvier 2019 pour les autres créateurs.
Les travailleurs indépendants des professions libérales ne relevant pas de la liste mentionnée ci-dessus et affiliés antérieurement au 1er janvier 2019 à la Cnav-PL et à la Cipav resteront affiliés à ces caisses. Toutefois, ils pourront demander à être affiliés aux régimes d’assurance vieillesse et invalidité-décès des travailleurs indépendants de droit commun entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2023, sous réserve d’être à jour de leurs cotisations dues au titre des assurances vieillesse et invalidité-décès des professions libérales et, le cas échéant, des majorations et pénalités afférentes. Cette nouvelle affiliation prendra effet le 1er janvier de l’année suivant celle au cours de laquelle ils auront notifié leur décision et le changement d’affiliation sera définitif.
Les professionnels libéraux affiliés au régime général pour les assurances vieillesse et invalidité-décès et ne relevant pas du régime micro-social pourront bénéficier, à leur demande, de taux spécifiques pour le calcul de leurs cotisations de retraite complémentaire obligatoire. Fixés par décret après avis du CPSTI, ces taux tiendront compte des différences existant entre les montants totaux des cotisations et contributions sociales dues par les travailleurs indépendants selon qu’ils relèvent ou non de la liste mentionnée ci-dessus.
Parallèlement, concernant les prestations des intéressés, l’article 15 de la loi prévoit la liquidation de leurs droits à la retraite de base par les Carsat et des dispositions particulières quant au calcul du montant de leur pension pour les périodes antérieures au changement d’affiliation dont les modalités d’application seront précisées par décret. Il prévoit également que les points qu’ils ont acquis dans le régime complémentaire d’assurance vieillesse de la Cipav seront convertis dans le régime complémentaire des travailleurs indépendants selon des règles déterminées par décret.
La gestion de la retraite complémentaire et de l’invalidité-décès déléguée au régime général
Les régimes de retraite complémentaire et d'invalidité-décès des travailleurs indépendants resteront en dehors du régime général. Le CPSTI sera chargé de leur pilotage.
Les régimes d'assurance vieillesse de base, de retraite complémentaire et d'invalidité-décès des professionnels libéraux, gérés par les sections professionnelles de la Cnav-PL, ne sont pas visés par la réforme et sont donc maintenus.
Le service des pensions de retraite complémentaire sera délégué aux Carsat et celui des pensions d'invalidité aux CPAM. Des conventions conclues entre le CPSTI et respectivement la Cnav et la Cnam préciseront les conditions de ces délégations (CSS art. L 632-3 et L 635-4-1 nouveaux).
Les conditions d’attribution, de révision et les modalités de calcul, de liquidation et le service des pensions d’invalidité seront déterminées par un règlement du CPSTI approuvé par arrêté ministériel (CSS art. L 632-2 nouveau).
La constatation de l’invalidité totale ou partielle incombera au service médical de la CPAM auquel le travailleur indépendant sera rattaché (CSS art. L 632-1 nouveau).
Recouvrement des cotisations
L'article 15 de la loi met fin à la responsabilité conjointe des caisses du RSI et de celles du réseau Urssaf en matière de recouvrement des cotisations et contributions sociales. Celui-ci relèvera de la compétence exclusive du régime général et sera ainsi confié à l'Acoss au niveau national et, au niveau local, aux Urssaf (CSS art. L 225-1-1 modifié).
Les Urssaf assureront le recouvrement des cotisations et contributions sociales dues par les travailleurs indépendants autres que celles dues par les professionnels libéraux et les avocats au titre de leurs assurances vieillesse et invalidité-décès (CSS art. L213-1 modifié).
A noter : Selon l'étude d'impact, elles prendraient également en charge les missions d'affiliation des travailleurs indépendants sur la base des informations transmises par les centres de formalité des entreprises.
Mise en œuvre de la réforme
Un Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants sera créé
Un organisme de droit privé, dénommé Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI), doté de la personnalité morale et dédié à la protection sociale des indépendants, sera mis en place (CSS art. L 612-2 nouveau). Il disposera d'instances régionales (CSS L 612-2 nouveau).
Le CPSTI aura pour rôle (CSS art. L 612-1 nouveau) :
de veiller à la bonne application des règles relatives à la protection sociale des travailleurs indépendants et à la qualité du service qui leur est rendu par les organismes du régime général ; – de déterminer les orientations générales relatives à l'action sanitaire et sociale spécifique aux travailleurs indépendants ;
de piloter le régime de retraite complémentaire et le régime d’invalidité-décès des travailleurs indépendants hors professionnels libéraux et la gestion du patrimoine y afférent ;
d'animer, coordonner et contrôler l'action des instances régionales de la protection sociale des travailleurs indépendants. Les directeurs des caisses nationales du régime général rendront compte au moins une fois par an de la qualité du service rendu aux travailleurs indépendants.
Les instances régionales désigneront un médiateur chargé d’accompagner dans leur circonscription les travailleurs indépendants amenés à former une réclamation relative au service de leurs prestations de sécurité sociale ou au recouvrement de leurs cotisations par les organismes du régime général (CSS art. L 612-4). Un médiateur désigné au niveau national par l’assemblée du CPSTI coordonnera l’activité des médiateurs régionaux (CSS art. L 612-3 nouveau)
Les dispositions relatives au CPSTI et à ses instances régionales entreront en vigueur au 1er janvier 2019 (Art. 15, XVI).
La réforme sera mise en place d’ici le 1er janvier 2020
La réforme sera lancée dès le 1er janvier 2018 et s'accompagnera d'une période transitoire de 2 ans. Sa mise en œuvre est confiée à un comité de pilotage composé des directeurs des caisses nationales du régime général et de la Caisse nationale du RSI provisoirement maintenue.
Ce comité devra notamment élaborer un schéma de transformation organisant la continuité des missions assurées auprès des travailleurs indépendants pendant la période transitoire et précisant le calendrier et les modalités de leur transfert aux organismes du régime général.
A défaut d’accord sur ce schéma au 1er avril 2018, celui-ci sera adopté par arrêté ministériel.
A compter du 1er janvier 2018, la Caisse nationale du RSI prendra la dénomination de caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants. Les caisses locales revêtiront, quant à elles, celle de caisses régionales déléguées pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants.
Dans l'attente de l'adoption du schéma de transformation, les anciennes caisses du RSI continueront d'exercer la totalité de leurs missions liées au recouvrement des cotisations et au service des prestations.
Elles exerceront les missions dévolues au CPSTI et à ses instances régionales jusqu’au 31 décembre 2018 et apporteront, jusqu'au 31 décembre 2019, leurs concours aux caisses du régime général.
Elles seront dissoutes au 1er janvier 2020.
La mise en place des mesures ne faisant pas l'objet de dispositions transitoires s'effectuera suivant le calendrier fixé dans le schéma de transformation.
Pour rappel, les mesures faisant l’objet de dispositions transitoires sont : le versement des prestations maladie-maternité par les CPAM, l’intégration des indemnités journalières des travailleurs indépendants hors professionnels libéraux dans les prestations de droit commun, la réécriture des dispositions relatives à la cotisation de base maladie-maternité, le basculement de certains professionnels libéraux dans l’assurance vieillesse du régime général, la création du CPSTI et de ses instances régionales.